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Mercredi : Antartiqua

Aujourd'hui, on doit partir trois jours en autonomie complète avec, au programme au moins un bivouac et....
la météo prédit de la tempête avec des vents de 110 km/h et plus.
Au petit déjeuner, les mines sont graves et avant même que je puisse avaler quoique ce soit Francis me prends par le bras et m'entraîne dehors.
Il a décidé de raccrocher. Il ne se sent pas à la hauteur et redoute d'être un poids pour le groupe au cours des trois prochains jours. J'essaye de le dissuader de nous quitter pendant près d'une heure mais sa décision est définitive. Il partira dès ce matin et je dois l'annoncer habilement à tout le groupe et à Pierre qui n'a pas été tendre avec lui la veille.
Xavier de son côté tient bon. Désormais, nous sommes dix.
Jean-Pierre (qui ne s'appelait pas encore Hermann) fait un brief un peu désordonné mais tout est dit : mauvais temps, itinéraire problématique et pomatoire, nuitées froides, repas frugaux, vêtements chauds et rechanges de rigueur, nourritures terrestres et spirituelles, etc..
Départ pour Espiaube.
Vu le vent en altitude, les œufs d'Espiaube (pour se rendre au col du Portet) ne fonctionnent pas. Un instant, Jean-Pierre qui mène pense abandonner le mini-raid dans la tempête. Trop tard ! C'est mal me connaître car j'avais déjà acheté des billets pour le télésiège, fermé la voiture à triple tour et égaré la clef quelque part loin au fond de mon sac et il me faudrait au moins trois jours pour la retrouver..
Nous étions donc condamnés à une bonne tranche de tempête ! Youpi !!!!!!!!!

Arrivé en haut de la Mirabelle, Jean Pierre s'élance à la tête du groupe. Pierre et moi, nous fermons. Le vent nous arrête, nous aveugle, nous bouscule.
Il se calme.
Je me retrouve tout seul avec Pierre. Le groupe a disparu. Nous sommes en vacances ! Re-youpi !!
J'adore les conditions extrêmes et les situations ubuesques !
Au cours d'une éclaircie nous rejoignons quelques membres esseulés du groupe mis KO par le vent.
Le vent est à ce point violent qu'il nous pousse même dans les montées. Il suffit de faire prise au vent comme sur un voilier. Génial ! J'adore.. Pourvu que ça dure.
100 m plus bas, nous apercevons le reste du groupe qui justement se regroupe. Nous les rejoignons et Jean Pierre se fait allumer par Pierre. Il est parti tête baissée dans sa veste, sans se préoccuper des derniers du groupe (cad nous) et dans le mauvais temps celui-ci a explosé.
Bon. tout le monde est là !
Nous dévalons les pistes d'Espiaube dans une atmosphère de guerre bactériologique (rien de moins).
Les téléskis et les télésièges tournent (au ralenti) mais il n'y a personne, ni sur les pistes, ni sur les remontées. Ils ont tous été emportés par le vent, loin d'ici.
Ainsi volent les skieurs !
On les retrouvera probablement dans quelques jours flottant à la surface de la méditerranée.
Nous, bien abrités derrière Jean Pierre, inarrachable avec ses 100 kg qui fendent la bise, nous avançons "vers l'infini et au-delà" (© Toy-story).
Avec son masque anti-brouilard et sa stature, dans la tempête, il ressemble à Hermann Bull de retour du Nangat Parbat
Au lac de L'Oule, le vent est plus doux mais on l'entend rugir dans la forêt.
Jean Pierre et une partie du groupe proposent d'abandonner le Néouvielle et la nuit à Auber et de se replier sur le refuge du Bastanet plus proche.
Comme on ne me demande pas mon avis, je le donne.
Je leur signale que le refuge est mal positionné sur la carte, qu'il a été bombardé par erreur par les Serbes lors de la guerre du Kosovo, qu'il ne peut accueillir que deux personnes et qu'en ce moment, il est plein de vaches espagnoles cannibales !!!!
Nous n'avons donc aucune raison d'aller au Bastanet !
Par contre, on annonce un car de suédoises en rut au refuge d'Aubert qui, par ailleurs, est chauffé, équipé de sauna et de bains moussants et où on nous a préparé des huîtres et du foie gras.
Pleine de bonnes raisons pour y aller. Pierre, le guide qui ne connaît pas l'itinéraire est un peu ébranlé par mes arguments. Pour se décider, il me demande à combien de marche est le refuge. J'essaye de ne pas trop mentir en annonçant "un peu plus de dix minutes" (en fait près de trois heures). Je crois que sur ce coup là, personne ne m'a cru mais on est quand même parti pour Aubert - Youpi !!
La montée au dessus du lac de l'Oule est tortueuse, raide et encombrée d'arbres vivants et morts.
Nous passons à proximité de l'endroit où quinze jours plus tôt, l'hélico avait embarqué Stéphane (voir W.E. mouvementé au Néouvielle).
Un peu plus loin alors que je fermais la marche, un peu distrait par quelques pensées, je relève la tête et dans la tempête, je ne reconnais plus l'itinéraire. Il me semble que l'on est trop à gauche (pour une fois).
Je convaincs le groupe d'obliquer vers la droite vers un collet.
Erreur. Nous étions trop à et il fallait obliquer vers la gauche !
Tout faux ! Je suis vert ! J'ai honte et demande pardon à tous, aux arbres, aux oiseaux, aux skis, aux vaches espagnoles et aux flocons qui se marrent et dansent autour de nous.
Bon, on rejoint 1/4 d'heure plus tard l'itinéraire mais je n'ai plus droit à la parole pour au moins dix ans !
Pierre, Olivier et Laurent sont aux commandes. Je ferme la marche.
Nous arriverons juste à la tombée de la nuit au refuge d'Aubert où un touriste à oublié de fermer la porte.
Séance "évacuation de la neige" qui s'est déposée sur les matelas et les couvertures du bas.
Le reste de la soirée se passe tranquillement. Dehors la tempête fait rage et aller chercher de l'eau au ruisseau prend des allures d'expédition en antarctique.


Jeudi : Samivel is still alive

Lever à 7 h.
Il fait très beau mais le vent souffle encore sur les crêtes.
Stéphane et Olivier encadrent la journée et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'ils ne sont pas trop motivés ce matin.
Le vent qui a soufflé toute la nuit a transporté beaucoup de neige et il faudra se méfier des plaques à vent.
De plus, on entend au loin des explosions ; Est-ce encore les Serbes qui bombardent le refuge du Bastanet (voir épisode précédent).
Non, ce sont les pisteurs corses de Saint Lary qui font sauter leurs pistes..
Un instant, Olivier et Stéphane veulent renoncer au Néouvielle, l'objectif de la journée.
Comme ils ne me demandent pas mon avis, je leur donne une fois de plus et j'insiste pour aller voir. Il sera toujours possible de renoncer si la neige est trop dangereuse.
Et nous voilà partis vers la hourquette d'Aubert dans un univers comme Samivel sait si bien les décrire.
La neige est fine et douce. L'ombre des arbres caressent de formes féminines et ça et là des oiseaux, des rongeurs ont déjà dessiné des phrases aux lettres cabalistiques.
Le paradis sur terre !
La caravane s'avance en silence dans cet univers féérique, magique.
Peu à peu, les pins à crochet nous abandonnent et nous laissent en tête à tête avec le Néouvielle qui lentement se dresse devant nous avec son chapeau plat et ses épaulettes en rocher verglacé.
Entre-temps, le vent s'est apaisé.
Nous traçons sans difficulté en tachant de faire de belle traces qui épousent la pente, le relief, la Montagne.
La trace doit être belle, douce, mélodique. Tracer dans cette neige et dans ce décor est un travail d'artiste !
Au pied de la brèche de Chaussenque, nous déposons une grande partie de notre matériel, ne conservant que ce qui est indispensable pour la poursuite de l'ascension.
Arrivé devant le grand mur de neige final, nous hésitons sur l'option à suivre .
Craignant la présence d'une plaque à vent dans la partie raide de la pente, Pierre propose de traverser à droite et de rejoindre à notre hauteur des rochers puis de monter les 200 derniers mètres en crampons sur la droite.
Je propose un autre itinéraire : monter à ski sur une croupe devant nous puis traverser la pente vers des rochers isolés qui ancrent l'éventuelle plaque et rejoindre plus loin des rochers à partir des quels on chaussera les crampons.
Olivier qui fait la trace et qui ne veut faire de peine à personne fait la synthèse de nos propositions et reprend le début de l'itinéraire de Pierre puis retraverse plusieurs fois la pente notamment dans une partie particulièrement raide et suspecte pour rejoindre ma proposition. Bel esprit de synthèse mais est-ce vraiment opportun !
Laurent apprécie modérément et nous fait un petit caca nerveux en plein milieu de la pente : "je veux limiter les conséquences de cette connerie" dit il en enfilant sa veste.
Je fais rapidement une coupe de la couche et sur au moins 80 cm, on trouve des grains fin bien stables qui reposent sur une couche plus dure.
Le danger semble finalement relativement faible à cet endroit.
Un peu plus tard, nous voilà en crampons juste sous le sommet.
Stéphane passe devant pour installer une corde fixe. Il tricote un peu avec la corde et il s'aperçoit qu'il a oublié comment faire un nœud d'encordement (ou nœud de guide). Pierre s'impatiente. Stéphane s'en va installer une seconde corde fixe mais cette fois, il est à cours de sangles pour poser des amarrages. Pierre le rejoint, fait des nœuds sur la corde et les coince dans des fissures ou derrière des blocs, comme au bon vieux temps !

Nous voilà tous au sommet, sans un souffle de vent.
L'ambiance est bonne. On sort le saucisson et je fête mon 19ème Néouvielle.
Au 20ème, je monte le champagne.

La descente s'effectue sur une neige de rêve ou les Bandits montrent à quel point ils savent dessiner des courbes rondes et régulières..
En quelques minutes, nous sommes au pied de Chaussenque où nous allons bivouaquer.
La lumière est sublime et le rocher prend une couleur de miel.

Pierre nous propose de construire deux Igloo selon la technique norvégienne.
Aussitôt dit, aussitôt fait.
Quatre volontaires sont désignés.
Ils s'installent tous les quatre à genoux, tête contre tête et ils disposent entre eux leurs sacs pour combler les vides.
On installe une sonde (ou un bâton) entre les jambes de l'un d'eux. Ce sera dans quelques minutes le seul moyen de communication avec la civilisation et l'extérieur. Cela servira essentiellement de signal d'alerte et d'évacuation si quelque chose tournait mal (angoisse, asphyxie).
On recouvre le tout d'une couverture de survie puis, très vite, on balance des "tonnes" de neige plus ou moins tassée sur les pauvres volontaires. Il faut aller vite. Au bout d'un quart d'heure seul le bâton que l'on surveille comme le lait sur le feu reste visible.
Pierre tasse la neige en se couchant sur le monticule puis, dans la continuité du bâton, il creuse une entrée ou une sortie (ça dépend de quel côté on est).
Il attrape les pieds d'un premier volontaire et le tire à l'extérieur. Puis il extrait un sac, un second bonhomme et ainsi de suite. Il était temps, certains commençaient à angoisser sec !
Au final, en 20 mn, un petit igloo est ainsi constitué et il ne reste plus qu'à creuser, non pas la voûte à laquelle il ne faut pas toucher, mais le sol que l'on va attaquer sur 1mètre de profondeur voir plus. On va également creuser en largeur, d'où la nécessité d'avoir une base très épaisse.
Un second igloo sera construit juste à côté et nous les ferons communiquer.
Ainsi en moins de 2 heures, nous avions un espace suffisamment grand pour loger 10 personnes assez confortablement.
C'est bien dans ces moments là que se fondent les groupes.
La soirée sera superbe. Le coucher de soleil montrera des couleurs incroyables allant du bleu clair au violet en passant par toutes les nuances de l'or, de l'ambre et du miel.
Dans les igloo, l'ambiance est carrément euphorique.
Quelle journée !

Vendredi : Retour vers l'enfer !

La nuit a été bonne et pour certains, confortable (ceux qui avaient des matelas gonflables notamment).
Le thermomètre est resté autour de zéro dans l'igloo et, de fait, la voûte n'a pas goûté à l'intérieur.
Dehors, ça devait pincer ferme mais, nos igloo étant exposés au Nord-est, on s'est réveillé avec le lever de soleil et très vite, la température est devenue acceptable pour cette altitude (2720m).
Les couleurs de la montagne étaient vraiment formidables et la pointe de Chaussenque prenait des couleurs chaudes, chatoyantes et semblait nous inviter à grimper jusqu'à sa pointe.
Mais, la journée allait être longue et quelque peu éprouvante.
En effet, il s'agissait de descendre du bivouac sous Chaussenque pour rejoindre la pente sous la Hourquette d'Aubert, mettre les peaux une première fois, remonter un premier col, enlever les peaux et redescendre dans le vallon qui mène au col de Madamette.
Remettre les peaux et passer à un col à gauche du Pic Plat.
Renlever une seconde fois les peaux pour dévaler les pentes jusqu'au vallon qui descend du pic d'Aiguecluse vers L'Oule.
Remettre une troisième fois les peaux pour passer une épaule qui nous permettrait de redescendre sur un lac au dessus du refuge du Bastanet pour remettre une quatrième fois les peaux et gravir un col à gauche du Pic de Pichaley, puis l'arrête en rocher facile jusqu'au sommet. De là, il nous faudra redescendre sur les pistes d'Espiaube en espérant arriver avant la fermeture et trouver un pisteur compréhensif qui nous laisse utiliser une remontée. Sinon, c'est encore les peaux jusqu'au col du Portet avant de redescendre sur les voitures, le tout avec des sacs encore assez lourds (15 à 17 Kg) sans les skis et l'eau.
Au total, au moins 1300 m de déniv. avec beaucoup de faux plats et jamais plus de 300 m d'affilé.
Laurent et Xavier devaient conduire cette journée. Je leur avais proposé cet itinéraire un peu inspiré des montagnes russes.
Avant de quitter les igloo, Jean-Pierre (Herman) nous fait une démo avec son GPS puis, nous allons tester la résistance des igloo.
Debout sur la voûte, ils tiennent bon. Nous les abandonnons en espérant qu'ils ne serviront pas de chiottes aux randonneurs du week-end à venir.
La neige est très bonne (ceux qui n'ont pas de skis paraboliques la trouvent soufflée, croûteuse et irrégulière).
Pour ma part, j'ai dû avoir de la chance, je ne me suis aperçu de rien)..
On assiste à deux superbes chutes dont une qui aurait pu très mal se terminer pour Alain car sa tête a heurté la neige de plein fouet à quelques centimètres d'un rocher.

Les deux premiers cols de la journée sont avalés sans difficultés ni fatigue dans un univers de rève : neige légère, courbes douces, belle trace, ombres et lumières se combinant avec les variations de relief..... De quoi pleurer d'émotion !
Cet itinéraire, bien qu'un peu casse-jambes du fait de ses ruptures de rythme (jamais plus de 250 m de déniv. d'affilé) est vraiment superbe et très sauvage, le tout sur un terrain très sûr, même en conditions avalancheuses.
La descente sur le ruisseau d'Aiguecluse emprunte des pentes Nord-Est qui n'ont pas encore jamais vu le soleil.
La neige y est succulente et y enchaîner des petits virages de godille, bien serrés, bien réguliers est un plaisir que l'on est pas prêt d'oublier (même avec des fixations déréglées).
Nous voilà enfin à un point d'eau où nous remplissons les gourdes.
Quelques minutes plus tard, nous repartons vers notre troisième col de la journée mais, cette fois ci les pentes sont exposées au sud et la neige s'est fortement humidifiée en surface alors qu'elle est restée froide à 10 cm de profondeur.
Prévoyant le coup, je mets un peu de silicone sur les peaux sous le regard incrédule de quelques uns.
D'énormes sabots de neige ne vont pas tarder à se former sous leurs peaux, chacun pesant plusieurs kilos et défonçant la piste à chaque pas. Herman et Nicolas dont les peaux laissent apparaître la trame, seront particulièrement gâtés.
Pour ceux qui ont pris le soin de se siliconer, pas de problèmes.
Malheureusement, le silicone est inactif sur une peau déjà mouillée. Il ne reste plus que la paraffine que l'on peut appliquer en frottant une bougie sur les peaux.
Cette recette a une relative efficacité mais Jean pierre va bien traîner 3 ou 4 kg de sabot jusqu'au Pichaley.
Le soleil est aussi très sévère pour le cuir chevelu et Alain qui n'a pas de casquette doit retracer pour passer à l'ombre des arbres et faire les pauses bien à l'abri des rayons.
La montée au col du Pichaley sera douloureuse notamment pour Jean-Pierre à cause de ses sabots mais aussi pour Pierre (le guide) qui se paie une hypoglycémie 50 m sous le col.
C'est la panne sèche. Au col, une fois restauré, il avouera avoir vu des étoiles et pourtant, la nuit était encore bien loin.
Dernière véritable épreuve du stage : arpenter la crête dénudée, soufflée par le vent qui va du col jusqu'au Pic de Pichaley et pour la première fois de la semaine, je passe devant, les skis sur le sac.
Ah ! ça fait du bien d'être devant, de montrer la voie, de tracer dans la neige glacée de bonnes marches qui, on l'espère serviront à tout le groupe, de décoder la pente pour y trouver le meilleur cheminement, le plus confortable, le plus sûr aussi.
Je me retrouve rapidement au sommet suivi de peu par Alain puis Laurent, mais après, les écarts se creusent et la fatigue cumulée de la semaine se fait sentir.
Jean Pierre (Herman) arrive au bord de l'asphyxie et Pierre s'est retardé pour récupéré de son hypoglycémie.
La vue du sommet est superbe sur 180 ° mais, à nos pieds, la station et sa foule se manifeste.
Il ne s'agit encore que de quelques fourmis qui grondent.
Dans quelques instants, ce sera une foule anonyme ignorant tout du calme et de l'harmonie qu'elle perturbe et que nous avons traversé au cours de ces trois journées.
Notre arrivée au téléski est d'ailleurs marquée par un certain malaise qui nous parcours tous : que de monde ! que de bruit !
Les skieurs nous dévisagent et détaillent du regard notre équipement lourd et encombrant, nos visages amaigris et mal rasés. D'un côté comme de l'autre, on se pose la même question : "Qu'est ce qu'il fait, qu'est ce qu'il a, qui c'est celui-là ?
Complètement gaga ce type là ! ..." (© Pierre Vassilu).
Mais, une vision d'horreur nous attendait encore sur la piste noire de Terranère qui nous permet de rejoindre les voitures.
En effet, l'heure de la fermeture des pistes approchait et, tel un troupeau quittant l'estive pour se rendre à l'étable, tout le monde se retrouve en même temps sur la même piste.
Il y a du monde partout ! Des fous déguisés en débiles gavés de bande dessinée américaine qui dévalent les pentes avec des patinettes sans contrôler grand chose, des gosses de 5-6 ans entraînés par leurs grands frères sur cette piste manifestement trop dures pour eux, des débutants errant au milieu du mur et qui scrutent le ciel à la recherche d'un hélicoptère salvateur, des compétiteurs qui répètent leur prochain slalom et des montagnards (nous), piolets et crampons bien prééminents qui, pris dans cette folie ambiante, se lâchent quelque peu en se disant qu'il faut au plus vite traverser cet enfer.
C'est vrai, j'ai attaqué comme un malade, j'ai essayé de m'extirper de cette marée humaine, j'ai aussi essayé de rester lucide et de conserver une marge de sécurité pour éviter, sous mes spatules, une embardée imprévue d'un enfant en perte de contrôle.
Mais vraiment, que cette folie est contagieuse ! Que les mouvements de foule sont dangereux et qu'il est dur d'y garder son calme et sa sérénité !
Heureusement, il n'y a eu aucun accident et c'est bien la preuve irréfutable de l'existence de Dieu !
Quel contraste également avec l'ambiance de notre descente nocturne sur ces mêmes pistes
18 jours avant, lors de notre retour du Néouvielle.
Nous avions rejoint le col du Portet, la nuit tombante.
Le temps de ranger nos peaux et de grignoter, le noir nous avait envahi.
Nous nous étions élancé avec nos frontales sur ces pistes damées, silencieuses, apaisées.
Et quel spectacle.
Les 11 lucioles du groupe valsaient dans la nuit et semblaient former une chorégraphie presque parfaite, calme et voulptueuse.
Tout le contraire de cette descente en enfer aux allures de débandade à l'entrée d'un hypermarché un jour de solde à 90 % !.
Une fois à la voiture, Pierre, qui a dû vivre quelques situations limites nous avoue n'avoir plus eu aussi peur depuis plusieurs années.
Vite, en voiture et gardons en mémoires ces trois journées extraordinaires.
 

Néouvielle 3071 m - Stage initiateur 2000


Generated by Galerie
dimanche 2 mars 2008


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